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19.11.2021 : Erwan Valazza, guitariste professionnel et professeur de guitare à l’ETM : "j’ai un son à moi, je suis fidèle à mon instrument".

19 novembre 2021 par
19.11.2021 : Erwan Valazza, guitariste professionnel et professeur de guitare à l’ETM : "j’ai un son à moi, je suis fidèle à mon instrument".
SERVETTE-MUSIC SA, VPI

> Bonjour Erwan, tu es professeur de guitare à l’ETM depuis 2 ans. Quel est ton parcours musical ?

Après des petites écoles de musique, j’ai fait un certificat de musique classique (guitare) au CPM à Genève. En parallèle, j’ai suivi des cours privés de jazz avec Christian Graf, qui m’a permis d’entrer à la HEMU à Lausanne. Là j’ai fait un master en performance, option jazz. Mon premier vrai projet avec lequel j’ai fait des concerts était orienté hip-hop/soul, qui s’appelait Cauliflower. Ensuite, à travers l’école, j’ai pu entrer en contact avec de nombreuses personnes, et j’ai joué dans beaucoup de projets en tant que sideman, notamment Dave Liebman, qui est un grand saxophoniste. J’ai aussi donné des cours de guitare, en privé et dans des petites écoles de musique, avant d’entrer dans une école de pointe, à l’ETM.


> Quels sont tes styles préférés ? Comment ton approche musicale a-t-elle évoluée ?

J’ai pas mal changé d’esthétique au cours des années. Comme tout guitariste qui se respecte, j’ai commencé avec le rock: j’étais plutôt orienté punk, et j’aimais les groupes de rock et de metal « classique ». Et puis j’ai découvert Jimi Hendrix, et j’ai été séduit par son jeu, son style un peu sale, très empreint de soul. J’aimais plus son jeu en son clair que ses riffs avec de la disto. J’écoutais aussi beaucoup de musique contemporaine, et beaucoup de hip-hop. Ça m’a conduit au sampling, et j’ai commencé à produire de la musique. J’ai commencé à sampler du piano, de la batterie, un peu tout, en fait.

A partir de là, la guitare est essentiellement devenue un outil d’improvisation. J’ai voulu sortir des sentiers battus, et le jazz était un domaine superbe pour me permettre de le faire. Je ne suis pas un grand bosseur, mais ça ce sont des aspects que j’ai beaucoup travaillés pour progresser, et développer mes solos, sortir de la sempiternelle pentatonique, connaître mon manche, apprivoiser les triades… J’ai commencé à jouer plus avec mes oreilles qu’avec mes yeux, et ça a changé la donne. C’est surtout par le jazz moderne que j’ai pu apprécier le jazz, et que j’ai enrichi et consolidé mon vocabulaire.

Et maintenant, je suis plongé dans la musique électronique. Je suis carrément dans le son en tant que tel, la patte sonore, et plus du tout dans la guitare au centre d’un groupe. J’adore les synthétiseurs, mais je ne suis pas pianiste, donc j’essaie de retrouver cette magie avec les effets de guitare. Delay, reverb, hamonizers, je m’en sers pour trouver un son parce que la guitare avec des effets m’intéresse de plus en plus avec le temps.


> Et tu as trouvé ton son ?

Oui, je crois, en tout cas je suis sur la bonne voie. J’ai un son à moi, je suis fidèle à mon instrument. Bon j’ai une guitare très polyvalente aussi, une PRS 513. Du coup ça me permet de retrouver beaucoup de sons différents, de celui de la Strat à celui de la Les Paul bien nerveuse. J’arrive ainsi à construire mon esthétique, qui se trouve à la croisée du jazz, de la pop indie, et de la musique électronique. Comme je te l’ai dit, je m’intéresse au son lui-même, et j’utilise des synthétiseurs, des samplers. Ma guitare est donc plus un des éléments d’un set électronique.


> Quelles sont tes guitares préférées ?

PRS est une marque que j’apprécie beaucoup. Elles permettent d’avoir une palette sonore gigantesque. J’ai découvert la marque à travers la gamme SE (NdR. : Paul Reed Smith Student Edition, des guitares fabriquées en Corée dont le contrôle qualité est assuré par l’usine du Maryland aux USA). Mais j’étais parfois un peu limité, surtout quand on me demandait de prendre un son de Strat, pour faire des cocottes, par exemple. J’ai trouvé la 513, et je n’ai plus eu besoin de chercher plus loin pour assurer dans toutes les situations, puisqu’elle me procure autant un son jazz très plein, mais aussi un son clair et brillant, etc. Avec toutes les possibilités qu’elle offre, c’est facile de retrouver tous les sons de guitare grâce à un switch ou un potard. Après, j’ai toujours ce rêve de gosse de me trouver un jour une vieille Tele, pour avoir un son Tele authentique à la maison, et pour certains projets, pour lesquels il faut ce son.


> On a passé un moment ensemble au magasin. De toutes les PRS que tu as vues, laquelle t’a tapé dans l’œil ?

La McCarty 594. Je l’ai trouvée vraiment très agréable. Le manche est confortable, les finitions sont fantastiques. Elle a un son plein qui me permet de retrouver les sonorités jazz, et en single, elle claque ! Pour moi c’est vraiment la meilleure.


> Quelle est ton expérience avec Servette-Music ?

Je connais le magasin depuis que je suis gosse, je me souviens d’y venir avec mon père à l’époque. Depuis que je suis arrivé à Genève, j’apprécie beaucoup la disponibilité de l’équipe de Servette-Music. Il y a toujours quelqu’un pour m’aider, il y a du choix. Les liens de Servette-Music avec l’ETM sont aussi enrichissants, ça facilite beaucoup de choses pour les professeurs comme pour les élèves. Et puis je ne sais pas s’il faut le dire, mais j’aimerais bien qu’il y ait plus de place pour les effets. Mais après ce que je t’ai dit sur ma recherche musicale et sonore, tu comprends bien pourquoi !


> Quels sont tes projets actuels ?

Mon projet principal en ce moment s’appelle « Mohs ». Je l’ai monté avec un ami trompettiste, un batteur et un bassiste, et c’est un mélange de toutes mes influences de ces 20 dernières années, jazz et musique électronique principalement. Les compos sont collectives, c’est un vrai groupe. J’ai un petit studio rue de Lyon, dans lequel on répète, on fait des prises de son, et on se renvoie la balle sur des idées pour les faire évoluer, et on va sortir notre 2ème album en février 2022.

Sinon j’ai aussi un groupe qui s’appelle « Ora », qui est un projet de musique électronique, et va jusqu’à la dance. C’est de la musique de club, avec des influences house, techno. C’est live machine. J’ai aussi la guitare sur scène, mais on utilise les drum machines, des samplers, et je fais des boucles de guitare en live, en contrôlant avec des synthés. On est loin de la formation de rock classique.

Dans une toute autre veine musicale, « Ticora » est un quartet composé d’un orgue, d’une batterie, d’un saxophone et d’’une guitare. On fait un mélange d’afro-beat, de musique de la réunion, de jazz. C’est un jeu complètement différent à la guitare, beaucoup plus rythmique. Et puis j’ai un groupe de musique de chambre qui s'appelle « Espuma Antigua », composé d’un violoncelle, d’une voix et d’une guitare électrique. On fait des arrangements contemporains de musique baroque (Bach, Vivaldi, Purcell). On est dans un truc très intimiste, c’est très doux. J’utilise beaucoup d’effets dans ce contexte, pour englober l’espace sonore avec des reverbs et des delays.


> Comment as-tu vécu la période COVID ?

On a dû s’adapter avec les cours à distance. Pour certains trucs, c’est plus facile : c’est confortable de rester chez soi, pour les cours de théorie c’est plus simple. Mais pour jouer la musique, c’est plus délicat, par la nature même de l’art. Niveau personnel, j’ai pris l’opportunité de me recentrer sur mes créations. Je suis sideman avec plaisir, mais je ne suis pas un mercenaire de la musique. J’ai donc aimé pouvoir passer du temps en studio pour faire de la recherche sonore, développer mes propres idées, et même apprendre à mixer.


Merci Erwan, nous allons tenir compte de tes remarques sur la place donnée aux effets car tu as raison, nous pouvons mieux les mettre en valeur. Passe une belle fin de journée et bonne continuation.